L’observatoire des publics et des pratiques culturelles- Sciences et Société

La culture – sous toutes ses formes, scientifique, artistique, numérique, historique, médiatique, sportive, etc. – , la diffusion et la construction des savoirs figurent parmi les missions fondamentales des universités et constituent le socle de notre vie en société. La création d’un Observatoire des publics et des pratiques de la culture – Sciences et société – répond à une demande croissante d’études de publics(1) et vise à évaluer les actions d’Aix-Marseille Université (ci-après « AMU »).  Les recherches, enquêtes et expertises produites, en plus d’amener des résultats et analyses, sont de nature à faire émerger des préconisations pour une meilleure compréhension des conditions favorables au dialogue entre les sciences et la société et au transfert de connaissances. La création de ce dispositif d’évaluation quantitatif, qualitatif, exploratoire et interdisciplinaire permet de connaitre et décrire les publics et leurs pratiques dans tous les domaines de la culture, de mieux évaluer et comprendre les formes de diffusion, les dispositifs de médiation et les logiques d’appropriation à l’œuvre dans la construction des pratiques(2).

 

La genèse de l’Observatoire des publics et des pratiques de la culture 

 

L’idée de cet observatoire remonte à 2013 au moment de la nomination de la ville de Marseille comme Capitale européenne de la culture (ci-après, « MP2013 »). Elle repose sur plusieurs enquêtes menées jusqu’en 2019 avec la cellule « culture scientifique » d’AMU ayant abouties à la création de l’observatoire en janvier 2022. Celui-ci s’appuie sur la rencontre et la collaboration de plusieurs spécialistes de la culture placés sous la coordination scientifique du Professeur Sylvia Girel. 

Après une licence et une maitrise en sociologie de l’art et de la culture à l’université de Grenoble, Sylvia Girel se spécialise sur les questions de culture, de pratiques culturelles et de réception en intégrant, en 1993, l’école des Hautes Études en Sciences Sociales de Marseille (EHESS) et le laboratoire SHADYC(3) constitué autour de Jean Claude Passeron. Elle y réalise sa thèse, soutenue en 2000, en ouvrant ses travaux de recherche à tous les publics et aux différentes formes de création, de diffusion et de médiation sur la scène Marseillaise. 

Cette connaissance des pratiques artistiques et des publics marseillais lui permet d’intervenir à l’occasion de MP2013 et de construire un programme de recherche collaboratif(4) auquel se rallie rapidement Maria-Elena Buslacchi qui réalisait à cette époque son travail de thèse sur Marseille et les grands événements culturels. De la même manière, Gloria Romanello ainsi qu’Elisa Ullauri rejoignent le projet afin de compléter leurs recherches respectives sur les équipements culturels et la médiation. 

En 2022, l’observatoire peut concrètement entrer en fonction à l’aide d’un financement du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation obtenu par Nicolas Claire alors vice-président « culture scientifique » d’AMU. Ce financement a permis de mettre en place l’équipe projet et de l’ouvrir à des chercheurs et collaborateurs issus de plusieurs disciplines.

 

L’expertise sociologique des pratiques culturelles : entre recherche universitaire et expertise professionnelle 

 

Les champs de recherche couverts par l’observatoire sont variés. Si au départ la sociologie des arts et de la culture prédomine, d’autres disciplines se sont rapidement agrégées au projet, telles que l’histoire et l’anthropologie. Sylvia Girel souligne à ce titre « la forte dimension interdisciplinaire de l’observatoire ». 

Celui-ci s’illustre également par l’objectif d’adapter les productions scientifiques et les résultats aux  demandes provenant d’opérateurs culturels en quête d’efficacité. Il s’agit de répondre au double impératif de satisfaire les exigences de la recherche mais également d’être en capacité de produire des études opérationnelles réalisées en formats courts au plus près des attentes des acteurs culturels. 

Cette double dimension s’inscrit de manière plus générale dans l’un des principaux enjeux de l’étude sociologique des publics et des pratiques culturelles qui est de préserver le lien social et d’œuvrer au dialogue entre la science et la société. Sylvia Girel précise que « la culture, dans tous les sens du terme, est ce qui construit le social, c’est ce qui fait qu’on vit en société et qu’il y a une possibilité de communiquer et d’échanger ». Les publics ne sont donc pas dissociés des lieux de diffusion ni des contextes qui sont considérés comme les éléments d’un même tout devant guider la réalisation des enquêtes. Sylvia Girel indique que « comprendre les publics et les pratiques de la culture, c’est aussi une manière de comprendre comment les publics s’approprient cette offre et vont l’utiliser ou non, comment elle va façonner leurs manières de penser sur le long terme et pas seulement dans une logique de quantification de la fréquentation d’un lieu ou d’un événement de culture scientifique ». 

Cette approche permet à l’observatoire de restituer son expertise sous diverses  formes, telles que des synthèses avec les résultats principaux et des préconisations ; des diaporamas « augmentés » et commentés par l’équipe ;  des fiches pratiques ; des capsules vidéos courtes et des rapports de recherches plus classiques.  

L’observatoire propose cette expertise d’une manière extrêmement rigoureuse d’un point de vue méthodologique. L’une de ses perspectives tend vers le développement d’un modèle de recherche applicable au périmètre d’AMU qui combine rigueur scientifique et dimension opérationnelle. Sylvia Girel résume les ambitions de l’observatoire en soulignant que « l’objectif est de rendre nos résultats accessibles, de systématiser une approche sociologique théorique et thématique pour montrer ce qu’on est capable de faire avec des dispositifs très concrets, les typologies d’enquête qu’on peut proposer. ». 

 

Un exemple d’enquête territorialisée : Le Fonds Régional d’Art Contemporain (ci-après FRAC) 

 

L’observatoire  a vocation à produire des recherches et des enquêtes sur les publics et pratiques culturelles entendues au sens large. Les opérateurs culturels visés sont multiples: associations, structures de diffusion des arts et de la culture (musées ou fondations par exemple). 

Cette structure de recherche se concentre sur les acteurs du périmètres d’AMU et de son territoire en produisant des « enquêtes territorialisées ». Celles-ci sont ajustées à la demande des acteurs et prennent en compte le territoire sur lequel ils sont implantés. Actuellement,  des enquêtes sont en cours de réalisation pour le compte du FRAC et  s’articulent autour d’un travail de recherche collaboratif. Sylvia Girel nous explique que « la demande d’enquête du FRAC est de mieux connaitre le public effectif mais aussi de connaitre les non-publics de proximité ». L’offre culturelle proposée par le FRAC touche en effet un public fidélisé mais échappe pour autant à certaines catégories de publics situées à proximité du lieu. Cette situation peut relever d’une forme de désintérêt et semble également résulter d’une méconnaissance de l’offre culturelle proposée. La nécessité de l’enquête repose dans l’analyse de ces « non publics » fondée sur une approche qualitative qui permettra de formuler des préconisations afin de les intéresser, les interpeler et les attirer. Reposant sur un périmètre allant du MuCEM jusqu’au quartier de la Joliette, l’enquête permettra de mieux délimiter les modes de circulations, les publics potentiels et les non-publics actuels de cet acteur culturel. 

 

---

(1) En interne mais aussi émanant des différents partenaires de l’Université: structures et institutions culturelles et de loisirs, collectivités territoriales, réseaux de diffusion de la culture scientifique, etc.

(2) voir:  https://mesopolhis.fr/observatoire-sciences-et-societe-mesri-amu/

(3)  Ce laboratoire interroge les questions de sociologie des arts et de la culture dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire

voir aussi: https://halshs.archives-ouvertes.fr/SHADYC

(4) voir:  https://publics.hypotheses.org/category/les-syntheses-de-terrain

 

---

---